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17/04/12

L’islam en Asie orientale et du Sud-Est
Avec l’islam, nous abordons une partie délicate de notre
propos, les représentations que l’on se fait de cette religion étant
particulièrement émotionnelles dans nos pays depuis le 11 septembre 2001. Plus
que jamais, il nous faut préciser de quoi nous parlons.
Essais de définitions
Musulman, islamique et islamiste ont été des mots autrefois utilisés
indifféremment pour exprimer l'idée « qui se rapporte à l’islam, qui est
de religion musulmane ». Il n’en va plus de même aujourd’hui, les mots
sont chargés de sens sous-entendu.
- Le mot « musulman » ne prête à aucune équivoque. Il désigne
la personne qui pratique l’islam ou se reconnaît dans cette religion et
tout ce qui se rapporte à l’islam : droit musulman, architecture
musulmane, littérature musulmane…
- Il devrait en aller de même du terme « islamique », qui lui est
synonyme, mais celui-ci est souvent paré d’une connotation polémique (cf
les « foulards islamiques »). Nous l’emploierons dans le sens « qui a
rapport à la religion musulmane, qui est conforme à l’islam ».
- En revanche, nous réserverons le mot « islamiste » à ce qui a
trait à l’islamisme, c’est-à-dire au courant revendiquant un
rôle politique pour l’islam, donc opposé au principe de laïcité.
Entendu ainsi, l’islamisme peut être modéré ou radical.
- Les termes de « intégriste », « fondamentaliste » et les
substantifs correspondants en « isme », empruntés à des branches
conservatrices du christianisme catholique et protestant, renvoient à une
conception littérale de la pratique religieuse et des croyances. Ils
n’impliquent nullement le recours à la violence. Laissons aux catholiques
l’intégrisme, qui concerne avant tout les rites, et aux protestants le
fondamentalisme, qui touche plutôt aux dogmes. À propos du wahabbisme
et de courants similaires, nous devrions plutôt parler de « rigorisme
».
- En revanche, nous utiliserons les mots « extrémiste », « extrémisme
» pour désigner les courants et organisations recourant aux mesures de
coercition et d’intimidation pour forcer leurs coreligionnaires à
pratiquer un islam pur ou pour réaliser l’unification du monde musulman
(califat mondial).
- Quant à la notion de « terroriste », « terrorisme »,
nous réserverons ces mots, dans l’étude qui nous intéresse, aux actes
de violence visant à contraindre l’ennemi à une action (libération de
prisonniers…), à l’affaiblir politiquement ou à lui occasionner le
plus grand tort possible sans objectif stratégique clair. On veillera à
distinguer ce qui relève du terrorisme religieux, du terrorisme politique...
et du banditisme.
- Quant au terme de « djihadiste », il peut être une bonne traduction
de moudjahid (pl. moudjahhiddin), combattant du djihad,
qui renvoie à une notion très discutée au sein même de l’islam : les soufis
parlent volontiers d’un « grand djihad » que l’on doit mener contre
soi-même. D’ailleurs, la pureté d’intention de ceux qui appellent au djihad
n’est pas toujours évidente. L’ambiguïté du terme réside dans le fait qu’il
désigne tantôt les guérilleros agissant, par exemple, en Afghanistan, tantôt
des terroristes ou des volontaires pour les attentats suicides. Il est vrai
que tous sont bien souvent formés dans les mêmes camps.
Ces quelques définitions posées, notre propos est de déterminer si, dans
la région qui nous intéresse, l’islam constitue une civilisation au sens que
lui donne Samuel Huntington. Trois pays de la zone Asie-Pacifique ont une
population majoritairement musulmane : l’Indonésie, la Malaisie et Brunei.
Quatre ont une minorité musulmane notable : Singapour, la Thaïlande, les
Philippines et la Chine.
Le cas de la Chine doit être mis à part. Dans les six autres pays cités, l’histoire
de l’islamisation est commune. Nous résumerons donc brièvement celle-ci
avant d’étudier la situation particulière de l’islam dans chaque pays.
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