La main

Accueil
L'homme
La femme
La main
Le pied
La hallebarde
Et puis...

17/04/2012

Idéogrammes comportant le pictogramme de la main

La main, plus particulièrement la main droite mais aussi la main cueillante, est sans doute l'élément que l'on retrouve dans le plus grand nombre d'idéogrammes.

Deux mains droites, c'est déjà, au moins quinze siècles avant notre ère, la poignée de main, le signe de l'amitié. Vous êtes dubitatifs ? Regardez bien : une des deux mains droites est bien reconnaissable en bas à droite. Quant au trait horizontal en haut, ce sont le poignet et le doigt du milieu. Et les deux autres doigts ? Bien sûr, vous les voyez à présent : c'est le trait oblique de gauche.

 

Moins pacifique, cette main tient un bâton ou une verge. Le symbole d'autorité est évident. Il s'agit du père .

 

 

Le même symbole d'autorité accompagné du pictogramme de l'enfant. Le père, encore ? Remarquez les deux croix au-dessus de la tête de l'enfant. Dans plusieurs idéogrammes, ces croix désignent des caractères. C'est l'art de l'écriture que l'on fait rentrer à coups de verges dans la tête de l'enfant ! Cet idéogramme signifie "enseigner" .

 

Ici encore, ce que rassemblent ces deux mains, ce sont des caractères, la connaissance. Cette action se déroule dans une maison, une école donc : il s'agit du verbe "étudier", "apprendre". Dans le style ultérieur des "petits sceaux" , on a cru bon d'ajouter l'enfant, ce qui nous conduit au caractère actuel .

 

Vous avez reconnu la vache ou le buffle, ainsi que la main. Que tient-elle ? Par assimilation avec le pictogramme de l'arbre, nous devinons qu'il s'agit d'un végétal dont la ramure est un petit peu plus compliquée. Ne cherchons pas plus loin, il s'agit d'une branche, d'une badine dirons-nous. Vous avez parfaitement deviné : il s'agit du verbe "mener paître" .

 

La ressemblance entre cet idéogramme et le précédent saute aux yeux. Deux mains tenant deux badines ? Non, mais nous n'en sommes pas loin. Il s'agit encore de branchages mais plutôt dans le genre bouquets de genêts. Les trois points que rassemblent ces deux bouquets, ce sont des détritus ou de la poussière. Oui, ce caractère signifie bien "balayer".

 

Que saisit cette main cette fois ? Une oreille. Cela rend la notion de "choisir", "accepter", "prendre" . On comprend l'idée : le choix d'un animal dans un troupeau, mais aussi d'un soldat pour une mission, en le prenant par l'oreille. Ce jiaguwen  est devenu le jinwen puis le xiaozhuan avant d'aboutir au caractère régulier .

 

Voici un idéogramme tout à fait remarquable. On y reconnaît un homme accroupi à la manière de la femme (mais il n'a pas les bras croisés sur la poitrine, c'est donc bien un homme) et deux mains qui semblent extrêmement actives. Entre ces mains, objet de cette activité, un arbre. Un arbre, vraiment ? Rappelons-nous que ce pictogramme désigne aussi, par extension, le bois. Il s'agit donc d'une pièce de bois. Ce très bel idéogramme désignait à l'origine l'artisan et un glissement de sens lui fait également exprimer la notion d'art.

Mais que tient cette main-ci ? Une autre main ? Non, il s'agit d'un pinceau. En dessous, une tablette reposant, semble-t-il, sur un chevalet. Il s'agit du verbe "peindre" .

 

 

Ne confondons pas le caractère précédent avec celui-ci. Les deux formes de jiaguwen que nous avons relevées comportent encore une main tenant un pinceau. Un pinceau ? Peut-être pas, après tout. en bas, sous la première forme, une coupe à pied. Sur la seconde, ce qui ressemble à un mortier ou à un bol. Cette seconde forme est intéressante car elle inclut encore deux points, représentant quelque chose de ténu, un presque rien (gouttes, vapeur, poussière dans d'autres caractères). Ce caractère est devenu , qui signifie "finir", "épuiser", "vider" et, par extension, "accomplir", "tout à fait". On y reconnaît aisément la main qui tient le "pinceau". Les quatre points pourraient être les points de la seconde forme du jiaguwen ou des poils du pinceau. Le chapeau de yeoman de la Tour de Londres, en bas, est la forme actuelle courante de l'article de vaisselle (plat, bol). Comment interpréter ce caractère ? A l'évidence, il s'agit de l'acte de vider la nourriture contenue dans un bol, a priori en la mangeant. On s'attend donc à ce que la main tienne des baguettes mais peut-être n'existaient-elles pas à l'époque. Une fourchette ? Ce serait surprenant. Une brosse pour laver le bol ? Cela n'expliquerait pas le sens d'accomplissement de ce caractère. Non, il s'agit bien de manger jusqu'au dernier grain de riz mais nous ignorerons peut-être toujours quel genre de couvert était utilisé à table. 

La "main cueillante" ou "griffe" au dessus d'un arbre ou autre végétal portant des fruits ou grains évoque bien sûr la récolte ou la cueillette. Il s'agit bien du verbe "récolter", "cueillir" .

 

Cette main tient non pas une cuiller mais une mailloche. Sur quoi frappe-t-elle ? Sur un tambour dont on distingue clairement le support et le couronnement. Essayez de vous représenter les gros tambours chinois reposant horizontalement sur un appareillage décoré, c'est bien ce qui apparaît sur ce caractère qui signifie "battre le tambour" ou, plus simplement, "tambour" . On retrouve le tambour, sans la main à la mailloche, dans l' idéogramme "bonheur".

Ce que saisit cette main, c'est un cauri, symbole, on l'a vu, de la monnaie et de la richesse. Cet idéogramme signifie "obtenir", "acquérir". Sous la seconde forme, on y a ajouté deux traits qui expriment en général le fait de marcher. Est-ce parce qu'il faut se déplacer pour obtenir ce que l'on veut ? Toujours est-il que cette seconde forme est à l'origine du caractère actuel .

Ce qui accompagne ici la main, c'est la langue, qui symbolise la parole. La main, signe de l'action, semble tenir cette dernière. La parole et l'action, c'est une affaire, une chose abstraite. Ce pictogramme et cet idéopictogramme sont toujours reconnaissables dans l'idéogramme actuel .

 

Que se disputent donc ces deux mains ? Une corde ? Jouait-on donc au tir à la corde dans l'antiquité chinoise ? Toujours est-il que cet idéogramme signifie "se disputer quelque chose", "se battre pour quelque chose".

 

Deux mains ne se disputent pas nécessairement un objet. Elles peuvent aussi le partager. C'est ce qu'exprime ce jiaguwen : le carré est une représentation courante dune marchandise. Dès l'époque de l'écriture sur bronze, on a interprété ce carré comme une bouche, ce qui a donné le jinwen . Dans le style des "petits sceaux", le trait horizontal de la bouche s'est allongé :. Cela nous conduit, les deux mains se rejoignant, au caractère régulier dont le sens demeure "commun".

Finissons cette énumération des idéogrammes mettant en action la main avec celui-ci, magnifique. Nous en avons recensé six formes, où l'on reconnaît sans peine une main guidant un éléphant par la trompe. La fragilité mettant en action la puissance : c'est "agir" , rien de moins ! Le symbole n'est-il pas extraordinaire ? C'est ce caractère que les taoïstes utilisent dans le précepte wuwei, le "non agir".

 

Précédente Remonter Suivante